21.5.06

Le vieil homme et le lac…




Sur la place du grand conseil, Franck Wong assistait à la présentation des nouvelles règles. Jérôme Spinétas les énumérait. L'évènement se passait sur la base nautique du grand lac artificiel urbain. Le bassin s'étendait sur trois kilomètres en longueur, deux en largeur. Autour, la ville, les tours, les habitations et les différents niveaux. Dans les airs, des ballons dirigeables aux logos de Oékoumene braquait leurs caméras pour offrir les meilleures images. Trois grand bateaux étaient placés en trèfles depuis la berge sud et s'écartant vers le nord-ouest, le nord, et le nord-est. Sur les navires, des spectateurs, par dizaine de milliers regardait au milieu du lac le plateau à sustentation hydromagnétique sur lequel statuait Jérôme Spinétas. Le plateau, de seulement quatre mettre sur trois était assuré par quatre mini-ballons dirigeables accrochés au bout de filins tendus. Jérôme était debout, entre deux colonne massives qui se projetait à plus de cent mettre de hauteur pour former une arche ovoïde dans laquelle apparaissait son image via un réseaux de projectoviseurs holographiques. Le spectacle était cyclopéen. Dans les airs, des centaines de Newscoms allaient et venaient entre les dirigeables de tournage. Il transportait des attachées de presse, des journalistes, des invités importants. On les apercevait depuis les berges, depuis les bateaux citoyens.
Le discours raisonnait sur plusieurs dizaines de kilomètres. Tous les terminaux, tous les écrans, toutes les installations de la ville entière diffusaient le son et l'image de l'allocution. Au-delà, c'était la même chose.
Franck Wong se demandait si quelqu'un d'autre que lui était effrayé par le pouvoir qu'avait Jérôme Spinétas. Il regardait le discours, déjà alarmant, mais ce qui l'inquiétait, c'était l'énergie dépensée pour l'allocution. À chaque projection de Jérôme Spinétas, la ville d’Oekoumène consommait tellement d'énergie qu'elle était vue depuis les stations orbitales de la Lune. Certain colon de Mars disait avoirs aperçus un éclaire depuis Mars, mais par temps étoilé et avec un bon système de visio-grossissement des particules de lumière. En une demi-heure d'émission, la consommation terrestre quadruplait, tous ça pour une diffusion mondiale et synchrone. À raison de deux discours par semaine, il fallait que le générateur d'énergie atomique à hydrogène desaturé soit continuellement réapprovisionné. La ville baignait dans une lumière blanchâtre.
Franck Wong devait voir Jérôme Spinétas, mais ce n'était pas le moment. Les attentats étaient maintenant aussi récurrents que les allocutions. Il fallait trouver une solution. Sur l'écran, le patriarche de la ville s'enorgueillit d'avoir aboli une vieille loi qui interdisait la participation aux résidents de Néo-Spartia. Estelle lui avait dit qu'elle y était retournée après l'explosion du siège de trie de participation à la citoyenneté, il y a quelques mois.
Sur l'écran, Jérôme évoquait l'allocution qu'il avait eue avec Istratant Slamuit il y a plusieurs années. Maintenant qu’Oékoumene avait prouvé son autonomie, la société pouvait passer à la phase d'autogestion. Tout le monde regardait.
Franck était stupéfait, dans la rue les véhicules s'étaient même arrêtés. Plus rien ne bougeait, sinon les cils des millions de spectateurs. Tous les citoyens avaient été programmés pour ce moment. Même Franck ne savait plus quoi faire d’autre.
Nicolas arrivait sur l’entrée de la place.