25.2.06

Irma, oh Irma !

Dans le magasin de chaussure, tout était grand et beau.
Il y avait toutes les couleurs, les formes, les styles.
Irma, aimait les bottes, avec de la fourrure, un peu de laine, et un petit talon.
Elle marchait lentement au milieu de ces chaussures. Combien de personnes pouvaient êtres chaussés avec ce qu'il y avait d'exposé. Se demandait-elle. Combien de clientes achetaient alors qu'elle avaient au moins déjà plusieurs paires? Et peut-être se trompait-elle? C'est peut-être les mauvaises questions qu'elle se pose !?!

Irma, avait rendez-vous avec Istratant.
...
...

Petit matin brumeux...




Il passe sur le trottoir, marche légèrement et observe les passants.
Il s'arrête pour se frotter la poche droite... en sort un paquet de cigarettes; l'autre poche lui offre un briquet. Puis la déambulation reprend le temps de quelques foulées. Il s'immobilise, et allume une cigarette en la protégeant du vent frais et triste.
La première bouffée, c’est la meilleure caresse du matin, enfin quelque chose de savoureux. Il lève la tête, marche vers sa voiture et au moment de l'ouvrir s'arrête au milieu de l’allée. Il lève la tête, vers la gauche, puis son corps suit l’impulsion pour lui permettre de se trouver face au ciel. Le vent, cette fois-ci est plus discipliné, plus paisible et lui souffle la volonté de passer une bonne journée. Il brave l'élément en exultant sa fumée dans la direction du vent. La fumée disparaît vite, trop vite. C'est bien. Il pense, il réfléchit, il lui semble que le bonheur pourrait se deviner au bout de cette rue. Un parc, une vue sur la cité, sur ce petit univers qui se hisse hors de la nuit. Lui qui le regarde et qui se lève aussi. Le vent l’encourage doucement, il se retourne et ouvre la portière. La voiture est froide, le matin encore plus. Mais le vent, lui à fait oublier que cela avait une habituelle solennité. Alors il démarre, allume le chauffage et entame une marche arrière pour sortir de sa place de stationnement. La buée, encore là, au rendez-vous crépusculaire, cache la vue. Une ombre féminine passe derrière comme une éclaire vermeille. Il faut attendre, avant de voir clair; patienter quelques secondes. Alors et enfin il peut filer...

Elle marche sur le trottoir d'en face, marche délicatement et étudie le passant qui se frotte la poche. Elle se dit qu'elle devrait arrêter de fumer. Mais elle n'ose aller lui supplier une cigarette. Elle saurait lui offrir du feu. Elle pourrait lui dire bonjour et même risquée de lui transmettre une bonne énergie. Il passerait une bonne journée. Mais elle ne sait pas. Estelle n'est même pas citoyenne, sa présence dans cette rue le trouble. Elle marche, sur le trottoir nébuleux et se rend compte qu'elle s'y est arrêtée pendant cinq minutes. Le fumeur est parti, elle se dirige subtilement dans la rue du parc. Elle passe derrière une voiture dont les feux de stationnement arrière sont allumés; telle une ombre; elle distingue la buée sur les vitres; et le regard amer du fumeur. Elle marche et le vent change de direction. Elle est poussée vers le parc et vers la cité; la vue, le matin...
Elle se pose délicatement sur un banc. Contemple la tour Eifel; enneigée; gracieuse, mélancolique. Elle sort de son sac un dossier rouge. Istratant, qui étais-tu? Et qui suis-je? Qui es-tu Nicolas?
Estelle prend son agenda et l'ouvre à la page du jour. Jeudi, émission Ouékoumène.
Elle respire vigoureusement, ferme les yeux. Contient sa respiration. Lève doucement la tête, doucement, très doucement, elle perçoit les pulsations de son coeur. Elle souffle, et se laisse surprendre à sourire imperceptiblement. Ses cheveux sont consacrés à une bourrasque qui les fait instantanément tournoyer, virevolter. Elle laisse sa tête se faire bercé par la brise matinale, et doucement, encore plus doucement qu'auparavant, son sourire se laisse contempler de plus belle. Un promeneur qui balade son chien mécaniquement se pose frugalement devant elle et là contemple, elle, ses cheveux, son extraordinaire sourire qui respire la liberté éolienne la plus honnête. Estelle, touche le vent, sa caresse sur son oreille droite, son coup, sa poitrine, son dos se détend; elle a les jambes brûlantes, ses chevilles lui sont agréables tant elle les sent et prend conscience de son corps. Ses mains glissées entre ses cuisses sont cuirassées par la tiédeur. Ses cheveux de temps en temps cinglent de toute leur courtoisie ses pommettes et viennent même quelquefois s’étaler contre sa joue droite. Elle respire, profondément, considère sa vie. Au dossier rouge. Elle sourit encore, elle sourit, elle aime cet instant. Le souvenir de cette ruelle; la couleur des phares de la voiture embuée; la cigarette allumée du badaud; son allure mélancolique et ses sourires éoliens.
Elle se lève, son téléphone sonne, elle répond.
Oui, Lucie. Dit-elle comme si elle savait qui était a l'autre bout du fil, avant même d’avoir répondu.
Je sais.
Oui. Dit-elle en riant.
Fou rire doux et serein.
J'arrive; fais chauffer les oeufs, je prends le pain.

Elle raccroche. Mets son portable dans son petit sac en plastique de grande surface. Elle scrute alentour. Fait demi-tour et marche vers une autre ruelle qui descend. Elle sait que sa journée sera longue; et il n'est que 6h00. Le métro ne sera pas long pour arrivé chez Lucie; sa petite Tante à la maison de zinc... Dans la rue; elle marche calmement. Au passage piéton; la voiture embuée se fige pour lui abandonner un chemin de passage. Elle tourne délicatement la tête et dévisage le fumeur.
Merci.
Elle traverse et disparaît dans la foule.

Lui, passe la première et descend la rue dans sa petite voiture embuée. Par instants, quelques bruits rythment son avancée en semant dans la rue cliquetis et suffocations mécaniques. Il s'allume alors une autre cigarette. Et son téléphone sonne.
Oui. Mal éveillé.
Je sais, l'émission est ce soir. Je sais, comment ? Ok, Estelle vous dites.
Hein hein.
D'accord; dès que j'arrive, je lui passe un coup de fil.
Il raccroche. Regarde devant lui. Un éclat de lumière lui pénètre le coeur, les yeux. Une colombe vole dans son sens et devance sa voiture en piquer. Il fixe le volatile et se dit que la journée sera longue et convenable.

À la radio; le présentateur annonce en ce petit matin brumeux la participation à Ouékoumène de la première femme non-citoyenne. À la météo ; un vent glacial et humide est attendu pour la journée…

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Populus Ex nihilo !




Je veux vivre !

C'est une histoire de mots piégés, tellements banals qu'on ne se rend plus compte de leur extraordinaire ambivalence.
"Peuple":
Faut-il entendre par là l'ensemble des individus qui composent le Nation ("le peuple français") ou bien, dans un sens plus restrictif, la partie la plus modeste de la population ? Pourquoi dans cette seconde acceptation le terme "peuple" a-t-il disparu au profit d'euphémismes variés ("la France d'en bas") ?
"Populaire": "quelle substance, quelle inflexion, quelle coloration l'adjectif "populaire" apporte, sous divers angles à ce qu'il qualifie ?"...
Quand on parle de "culture populaire", par exemple, que faut-il entendre: une culture issue du peuple ?
Une culture faite pour le peuple, mais pas par lui ? Ou, plus banalement, une culture largement diffusée ou partagée (synonyme de culture de masse) ?
"Populisme", enfin. Durant la dernière décennie, cette catégorie a pris une connotation négative très nette, notement en science politique où il caractérise la stratégie du Front national (appel au peuple, démagogie, charisme du chef) tout en stigmatisant ceux qui lui donnent leur voix ("vote populiste"). Il faut pourtant se rappeler que, dans l'histoire, les mouvements qualifiés de populistes étaient progressistes, et visaient à "l'émancipation sociale et politique des groupes populaires".
Faut-il y voir un retournement de tendance, les intellectuells voyant désormait moins dans le peuple une cause à défendre qu'un problème à résoudre ?

Archives Multiformats Ouékoumédia (Février 2002)

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